CAMPUS (Ferdinand)

CAMPUS, Ferdinand (Koekelberg, Bruxelles, 14 février 1894-Anderlecht, Bruxelles, 20 avril 1983), professeur/recteur et  ingénieur

Après avoir passé sa prime jeunesse à Gand, Ferdinand Campus, fils d’un administrateur des postes, suit son cursus à l’Athénée royal de Bruxelles et à l’École polytechnique de l'ULB, d’où il sort avec fruit, en 1914, avec le titre d’ingénieur civil des constructions. Quelques mois après le déclenchement de la guerre, en juin 1915, il rejoint clandestinement les Pays-Bas, s’engage comme volontaire dans l’armée belge et parvient à gagner Bayeux, en Normandie, où se trouve le centre d’instruction des officiers auxiliaires d’infanterie. Dès lors, il sera versé dans le Génie, jusqu’à la fin du conflit. Le 19 juillet 1919, il épouse Suzanne Dubois, dont il aura quatre enfants : Jean (1920), Claire (1921), Monique (1922), Pierre (1924).

Nommé ingénieur des ponts et chaussées en 1919, il obtiendra ensuite le diplôme d'ingénieur électricien, à la suite d’une formation à l’Institut Montefiore de l’Université de Liège. Après les années de formation, et les années de guerre, frein inévitable à la carrière, celle de Campus peut réellement prendre son élan à près de 30 ans. C’est ainsi qu’il se voit nommé, en avril 1923, directeur des Travaux Publics, Chemins de fer, Postes, Télégraphes et Téléphones du Territoire de la Sarre, sous mandat de la Société des Nations de 1919 à 1935. Campus contribue à moderniser cette région : les secteurs du logement, des axes routiers ou des réseaux téléphoniques n’y échappent pas. Par cette rare opportunité, il se forge une réputation et bénéficie de l’occasion de développer ses capacités. En 1926, après plusieurs années d’intense labeur, il démissionne et obtient d’être nommé professeur à l’Université de Liège, afin de diriger le nouveau service de génie civil et, par après, de donner les enseignements relatifs à l’hydraulique fluviale, jusqu’à son accession à l’éméritat en 1964. Dès le début des années 1930, son laboratoire jouit d’une notoriété internationale, fruit d’une activité incessante de Campus, qui, par ailleurs, y laisse une partie de sa santé et doit déléguer partiellement sa charge universitaire.

À l’été 1940, suite à l’invasion allemande, les locaux de l’Institut de Génie civil de l’ULg sont investis par l’occupant, lequel y entrepose armes antiaériennes et projecteurs, à la grande inquiétude de Campus, craignant la destruction de son lieu de travail. Il en référera au recteur, Léon Graulich. Quant à son activité durant la Campagne des Dix-Huit Jours, retenons qu’il était de service, du 10 au 14 mai, au barrage de Hansbrug (entre Malines et Louvain), où il fut blessé, tandis qu’il démontait une passerelle. Tout en poursuivant son enseignement sous la seconde occupation (au sein de la faculté technique, devenue des sciences appliquées, en 1937), Campus sera nommé commissaire provincial à la Restauration en octobre 1940, puis chargé de l’administration des eaux de la province de Liège (1942-1944) et contribuera à reconstruire un nombre non négligeable de ponts détruits par les aléas du conflit. Sa place au sein de l’Alma mater liégeoise, au lendemain de celui-ci, prend également une autre dimension, tout particulièrement suite à sa désignation en tant que recteur de l’Université de Liège, poste qu’il occupe de 1950 à 1953, avant le « règne » de dix-sept ans de Marcel Dubuisson, face auquel il ne se représentera pas.

Toutefois, c’est au lendemain de son rectorat et, paradoxalement, à la faveur de celui de Dubuisson, que Campus va pouvoir tourner son regard vers l’Afrique centrale. En effet, on a beau passer par le menu l’intégralité de ses travaux, il n’est nullement question du Congo belge avant la seconde moitié des années 1950. Il serait tentant d’y déceler une passion tardive pour la Colonie. Sans conteste. Mais, il convient, par ailleurs, de rappeler que l’Université de Liège ne s’est vraiment dotée d’une politique congolaise proactive qu’à partir de la personne de Dubuisson, acteur de premier plan dans les relations Métropole-Colonie, et conseiller avisé du jeune roi Baudouin. D’autres que Campus vont suivre Dubuisson dans ses projets de développement, notamment au Katanga, à l’instar du professeur de sociologie René Clémens ou du botaniste Raymond Bouillenne. Administrateur de l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique centrale (IRSAC), sur une proposition de l’Institut royal colonial belge (future Académie Royale des Sciences d'Outre-Mer), Campus en sera le vice-président de 1954 à 1960. Si d’autres professeurs liégeois sont chargés, par exemple, du développement de la cité de la Katuba, dans la banlieue d’Élisabethville, ou de dispenser certains cours au Congo, Campus se voit chargé d’une mission qui lui est tout à fait idoine. En effet, suivant une spécialisation dans un domaine où il a acquis une grande maîtrise, il évalue, sous les auspices du ministère des Colonies, de l’été à l’automne 1954, la possibilité de franchir de certains fleuves, à l’instar du Lualaba ou du Congo, à hauteur de Stanleyville, Léopoldville ou, encore, de Matadi. Vice-président (1955) puis président (1957) de l’Université officielle du Congo belge et du Ruanda-Urundi, il est, en outre, chargé de se pencher sur une question qui s’apparente à un serpent de mer du territoire congolais, à savoir l’aménagement des rapides de l’Inga. Sur le plan de l’administration du Congo, l’apogée de Ferdinand Campus est atteinte lorsqu’il se voit confiée la présidence du conseil d’administration de l’Institut national pour le Développement du Bas-Congo (1958-1960). En parallèle, il sera élu membre de la future Académie royale des Sciences d’Outre-Mer (ARSOM) en 1950, avant de la présider, en 1964.

Toutefois, il serait erroné d’affirmer que l’action de l’Université de Liège au Congo se fit dans la plus totale cohérence. En effet, à titre d’exemple, au cours de l’automne 1960, tandis que le Congo, après avoir déclaré son indépendance, est plongé dans une crise sans précédent, le ministre des Affaires africaines, Harold d’Aspremont Lynden, souhaite charger René Clémens de certaines missions spéciales au Katanga, en faveur de la sécession de Moïse Tshombé. Or, ils s‘avère que Clémens entretient de mauvaises relations avec Robert Rothschild, chef de la Mission technique belge au Congo (MISTEBEL), mais aussi avec son collègue Ferdinand Campus, qui, selon d’Aspremont Lynden, fait partie du « panier de crabes »...

Après son éméritat, Ferdinand Campus poursuit ses activités de recherche, mais s’adonne également à la rédaction de plusieurs notices biographiques, qui témoignent de certaines amitiés, aussi profondes qu’inattendues. Ainsi, on découvre un Campus particulièrement proche du peintre et caricaturiste du Pourquoi Pas ?, Jacques Ochs.

Ferdinand Campus accède à l’éméritat en 1964 et décède près de vingt ans plus tard.

 

Vincent Genin
Boursier de doctorat (ULg)
28 novembre 2013
V.Genin@ulg.ac.be

 

Sources inédites

 

Archives de l’Université de Liège, dossier de carrière de Ferdinand Campus (n° 1542).

Archives de l’Université de Liège, Fonds FULREAC.

Archives Générales du Royaume, Fonds Harold d’Aspremont Lynden (n° 31, 106).

Correspondance René Clémens-Marcel Dubuisson (documentation personnelle).

 

 

Travaux scientifiques

 

Amici et alumni : hommage à Ferdinand Campus. Miscellanées recueillies à l’occasion de son soixante-dixième anniversaire, Liège, Thone, 1964.

Bracke (J.), La bibliothèque Ferdinand Campus de l’Université de Liège, Liège, ULg, 1971.

Dehousse (N.), In memoriam Ferdinand Campus, Liège, ULg-CERES, 1983.

Genin (V.), « La France et le Congo ex-belge (1961-1965). Intérêts et influences en mutation », in Revue belge de Philologie et d’Histoire, à paraître.

Grogna (N.), L'action de l'Université de Liège au Katanga, mémoire de licence en histoire, ULg, 1986-1987.

Housen (J.), « Le Val-Benoît, témoignage majeur du Modernisme à Liège », in Cahiers de l’urbanisme, n° 73 (septembre 2009), pp. 52-56.

Jaumotte (A.), « Notice sur Ferdinand Campus », in Annuaire de l’Académie Royale de Belgique, Bruxelles, Palais des Académies, 1984, pp. 38-104.

Jaumotte (A.), « Ferdinand Campus », in Nouvelle Biographie Nationale, t. 2, Bruxelles, Palais des Académies, 1990, pp. 73-76.

 

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Biographical Dictionary of Overseas Belgians