de TRY (Ernest)

de TRY (DETRY), Ernest (Bruxelles, 31 mars 1881- Bruxelles, 9 juin 1960), administrateur de sociétés coloniales, écrivain, journaliste et fondateur de journaux coloniaux, auteur de brevets d'invention.

 

Issu d'une famille namuroise bourgeoise portant jadis la particule, Ernest de Try, officiellement Detry, ressuscite cet usage. Fils unique d'un père fonctionnaire à Bruxelles et d'une mère brabançonne, sa famille compte des personnalités: René-François Detry, chef de cabinet du ministre des Colonies, et président-fondateur de la Loterie Coloniale, le chanoine Jules Detry, journaliste, conférencier et explorateur missionnaire, et Arsène Detry, peintre du Hainaut honoré de nombreux prix artistiques, et ami de Magritte.   

Formé au Collège Saint-Michel à Bruxelles, de Try fait état de deux années de Philosophie et Lettres à l'ULB où aucune trace de lui n'a été trouvée ; pas plus la formation d’"ingénieur " dont il se targue n'a-t-elle été confirmée par des recherches entreprises en Belgique et en France. Quoi qu'il en soit, il parle et écrit avec facilité le français, le néerlandais, l'italien et l'anglais. Entreprenant, il propose vers ou prose à divers éditeurs, et ce dès 1903 pour Le Petit Brabançon, journal hebdomadaire politique et social du Brabant Wallon créé en 1898.

Clerc chez un avoué, il est ensuite engagé comme vérificateur des impôts pour l'Etat Indépendant du Congo et embarque pour l'Afrique en 1906. Atteint de névralgies cérébrales, il démissionne moins d’un an plus tard malgré de flatteuses appréciations de sa hiérarchie. Il s’occupe alors d’intérêts coloniaux privés en tant qu'« ingénieur-conseil». Délégué de la Bourse de Bruxelles, il est en 1908 en voyage d'études en Guinée française, à São-Tomé et au Gabon pour un groupe franco-belge, resté secret, en vue d'y établir des plantations. Correspondant pour l'Information à Paris, il fonde, en 1909, deux journaux financiers, L’Agio, magazine hebdomadaire d'économie générale, et L’économie mondiale, qui soutiennent les intérêts belges au Congo. Fin expert en marketing, de Try ne manque pas de souligner dans le supplément commercial de l’Agio qu’il propose aux souscripteurs des espaces publicitaires uniques. Il s’intéresse aussi à des affaires en Europe (Chemins de fer de Notre-Dame de la Garde à Gênes, et grand hôtel de Font-Romeu, projet abandonné en 1910 faute de liquidités suffisantes), mais encore en Afrique (sociétés minières de cuivre au Bas-Congo, et pétrolières en Angola). Il écrit dans Lettres d'Afrique et lance Outremer, courrier mensuel des Lettres coloniales.

En 1910, il fonde l’«Aéro métallurgique », société anonyme qui a pour objet l'exploitation d'un brevet de moteur d'aviation, et la vente et l'achat de voitures automobiles. L'année suivante, il retourne au Congo pour étudier l’implantation d’une brasserie au Mayumbe. Ernest de Try multiplie les contacts avec des personnalités, notamment Adolphe Max, bourgmestre de Bruxelles, et le chevalier Todros, et signe en tant qu’«intermédiaire de banques» une convention de création d'un syndicat d'études en vue de prospection minière et pétrolière dans l'Angola portugais. Actionnaire de la «Société belge de librairie », il publie en 1912, dans L’Expansion coloniale belge, un plaidoyer pour la colonie du Congo. 

Ernest de Try prend, en 1913, la direction des plantations de la Luki. Début 1914, il projette avec «Lever brothers», de Port-Sunlight en Angleterre, l’établissement de blanchisseries mécaniques au Congo et en Afrique et rédige un rapport intitulé Modern African Bleaching-Houses. La même année, il crée le «Syndicat d'études de l'Hinterland du Congo maritime» visant à trouver au Mayumbe des terrains pour des cultures tropicales. Lors de la Première Guerre mondiale, il est incarcéré à Louvain pour s'être soustrait au contrôle militaire de l'occupant. Cela ne l'empêche pas de penser à la création de sociétés coloniales liées à la culture industrielle de la banane et à l'exploitation des plantes à fibres au Bas-Congo; en 1916, il envisage la construction d'une piscine à Boma, d'hôtels de grand luxe au Maroc et, sur la côte occidentale d’Afrique, pour la « African Palaces Company ». Il espère le soutien de Georges Marquet, homme d'affaires namurois qu'il connaît bien, mais celui-ci refuse d'investir dans les colonies.

En Afrique, après la guerre, Ernest de Try établit et dirige au Mayumbe le « Syndicat d’études d'Exploitations Fruitières » (SEEFAM) qui cultive surtout la banane et ravitaille les indigènes. En 1921, il se consacre à des projets pour la société anonyme «Omnium africain». Il se qualifie d’ingénieur disposant de relations et s’occupant d’entreprises sur la Côte occidentale d’Afrique. Il précise en outre détenir du matériel breveté pour la Colonie.

 Il retourne au Mayumbe pour une mission de prospection forestière et, en 1922, réalise pour un groupe financier belge non précisé un rapport sur la création d'une exploitation forestière et d'une fabrique mécanique de pâte à papier. Il se dit aussi «officieusement» chargé par le ministère des Chemins de fer belges d'envisager l'exportation de bois coloniaux pour les traverses de chemin de fer.

En 1924, il dépose au ministère des Colonies un brevet d'invention et deux de perfectionnement pour un « Panneau synthétique ou en matériaux combinés pour toutes constructions» dont il accorde la licence à Henri Bombeeck, industriel, et à un associé, pour l'exploitation  en Corse et dans les départements français bordant la Méditerranée. Il a introduit, deux ans plus tôt, un brevet de perfectionnement portant sur un «Dispositif de panneau en ciment armé pour constructions démontables et autres». En 1925, il fonde et dirige le Moniteur général des intérêts coloniaux en Belgique, pour lequel le ministre des Colonies, Henri Carton de  Tournai, l'assure du concours de son département. 

En vente dans les grandes villes belges et de l'Europe actuelle, l'éditorial l'est également en Afrique, en Asie et en Amérique, et la régie publicitaire est percutante stipulant «La publicité est une semence dont la récolte est la clientèle». Le journal, bimensuel, traite de tous les sujets et joue un rôle d'office colonial pour l'emploi et d'agence de voyages. Peu après sa fondation, de Try cède ses parts à la société anonyme «Etablissements J. Schiks», à Bruxelles, qui s'enorgueillit de garder son fondateur comme correspondant. A une époque non identifiée, il écrit aussi le scénario d'un film, "Un demi-siècle de colonisation au Congo belge". 

En 1928, de Try effectue une ultime mission au Mayumbe pour le compte de la Société forestière belge. 1929 sonne le glas de ses activités coloniales, et il se consacre alors à la littérature, en poursuivant des activités de vétéran de l’Etat Indépendant du Congo dont il est le rédacteur de la Revue éditée, et entretient des correspondances suivies avec l’Association de la Presse. En 1935, il publie un vibrant hommage à Bruxelles dédié à Adolphe Max, et illustré de ses poésies et dessins à la plume. Il adresse au Roi un long rapport visant à le sensibiliser à la condition des anciens coloniaux, atteints de maladies ou sans ressources. Il s’occupe aussi de tourisme à Bruxelles proposant de la navigation de plaisance avec des bateaux ayant pour noms « Vedettes du Midi ». En 1936, il fonde et assure la direction du journal La Gazette des Métiers bruxellois.

En mars 1939, il a le projet d'évoquer ses souvenirs d'Afrique, mais le reporte, sans jamais y donner de suite. Il continue à écrire et dédicace sa prose à la famille royale ou à des personnalités coloniales, comme le général-chevalier Josué Henry de la Lindi ou l'ancien ministre des Colonies Paul Charles. Après une existence diversifiée et contrastée, de Try se marie, en fin de vie : en 1958, il épouse Francine Duchâteau, la secrétaire de rédaction de certains de ses éditoriaux. Il s'éteint sans descendance deux ans plus tard. Son fonds d'archives déposé aux Archives Générales du Royaume entretient sa mémoire.

Philippe-Edgar DETRY
28 avril 2014
philippe.detry@gmail.com

Remarque générale : l’ancêtre commun entre l’auteur de la notice et Ernest de Try est Mathieu de Try (1664-1748) , propriétaire, censier de la Ferme de la Tour à Saint-Marc, bourgeois de Namur le 3 novembre 1699, époux de Catherine le Pas.

 

Sources inédites

Archives Générales du Royaume, Fonds Ernest de Try (Thielemans (M.-R), Inventaire des papiers Ernest de Try (1885-1956), Bruxelles, 1970 ; Coppejans-Desmedt, Guide des Archives d'entreprises conservées dans les dépôts publics de la Belgique, Bruxelles, 1975). Archives du Collège Saint-Michel à Bruxelles conservées au KADOC à Leuven.

 

Archives du Ministère des Affaires étrangères, dossier De Try, RM 889-136 et SPA 1175-408.

 

Sources publiées

  1. Publications d’Ernest de Try

de Try (E.), La bière dans la colonie, in La Métropole, 27 juin 1911.

de Try (E.), Une Carrière, une Ecole,… mais non un Refuge !, in L’Expansion coloniale Belge, 1912.

de Try (E.), Saint Michel et sa Bonne Ville de Bruxelles, Diorama poétique, Bruxelles, 1935.

de Try (E.), Mémoire à Sa Majesté Léopold III, Roi des Belges, relativement aux Invalides de l'Etat Indépendant du Congo; La Gazette des Métiers bruxellois, n°1, 15 juin 1936 conservé à la Bibliothèque Royale de Belgique sous la cote AVB J 370 /4.

  1. Autres sources publiées

Bulletin communal de Bruxelles, 18 juin 1934, pp.771-772.

 

Travaux scientifiques

Notice sur René Detry, in Biographie coloniale belge, tome V, 1958.

René Detry, in Nouvelle Biographie Nationale, Bruxelles, 1997.

Canonne (X.) & Mengeot (Ch.), Arsène Detry 1897-1981, Charleroi, 1997.

Gillet (C.), Jules Detry dans les Marches tibétaines. Itinéraire d'un missionnaire (1947-1951), Mémoire présenté en vue de l'obtention du grade de licenciée en histoire, UCL, année académique 2005-2006.

Cryns (Dr. P.), Jules Detry, Un aventurier de Dieu, s.l.n.d.

 

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Tomaison: 

Biographical Dictionary of Overseas Belgians