LIBON, Joseph (Verviers, 17 janvier 1821- inhumé à Inhauma, Brésil, le 2 août 1860), botaniste, naturaliste-collecteur.
Fils d’un jardinier qui était, dit-on, au service de la famille Simonis, dont le nom reste indissociable de l’histoire de l’industrie lainière verviétoise, Joseph Libon entra dans le célèbre établissement horticole liégeois de Lambert Jacob-Makoy (1790-1873), en 1840. En novembre 1841, pour son premier voyage au Brésil, il accompagnait le Danois Peter Claussen (1804-1855), collecteur professionnel qui avait déjà longuement séjourné dans ce pays. Le jeune homme semblait représenter les intérêts de la maison horticole liégeoise dans l’association qu’elle avait apparemment montée avec le naturaliste scandinave. Libon fit, au Brésil, dans les provinces de Rio de Janeiro et Minas Gerais, d’amples collections de plantes, probablement sous la direction ou les conseils de Claussen et de Ludwig Riedel (1790-1861), botaniste du Musée national de Rio. Le fruit de ses collectes fut envoyé au Muséum National d’Histoire Naturelle, à Paris, et aux établissements horticoles Jacob-Makoy et Galeotti (1814-1858), ce dernier sis à Bruxelles.
Il revint en Belgique à la fin de l’année 1843, et y séjourna jusqu’en 1845. C’est alors qu’il aurait été chargé d’un nouveau périple au Brésil, pour le compte de l’horticulteur bruxellois J. De Jonghe ( ?- ?). Il déploya ses activités dans le sud de ce pays (Rio de Janeiro, Mato Grosso, Minas Gerais, Sao Paulo…), d’où il fit plusieurs riches envois de plantes. Il devait rentrer en Belgique à la fin du mois de septembre 1849. C’est alors qu’il devint chef de culture, semblerait-il, de l’établissement horticole de J. De Jonghe. En 1856, l’importateur bruxellois établira une liste partielle des taxons que Libon avait jusqu’alors collectés pour lui, où il soulignait lourdement l’importance de ses apports à l’horticulture belge. Il semble que De Jonghe cessa le commerce des plantes de serre en 1858, et qu’il fit faillite, cette année-là, ou la suivante. Lorsque la justice procéda à la vente des biens de l’horticulteur, il ne restait plus qu’une cinquantaine de feuilles en bon état de l’herbier du Brésil que le Verviétois avait collecté pour lui. Cette petite collection, qui comptait à l’origine 4.000 à 5.000 feuilles, fut acquise par le comte Alfred de Limminghe (1834-1861), à l’ occasion de la vente publique.
C’est en 1858, que Libon se serait mis au service du célèbre Jean Linden (1817-1898), ancien collecteur de plantes en Amérique latine et, pour l’heure, directeur scientifique du zoo de Bruxelles, où il pratiquait également un commerce de plantes exotiques. Dès 1859, Libon reprit la route du Brésil, mais à la demande de Jean Linden, cette fois. Durant ce troisième voyage, il aurait envoyé au moins deux grandes collections de plantes à Bruxelles, qui arrivèrent, dit-on, en excellente condition. Les services qu’il rendait à l’horticulture nationale lui valurent l’attribution de la décoration agricole de 2e classe, en juillet 1860.
Son décès prématuré, quelques jours plus tard, fit qu’il ne reçut jamais cette distinction. Il fut enterré à Inhauma, le 2 août 1860. Quelque 16 ans plus tard, le Conseil communal de Verviers dédierait une rue de la ville à Joseph Libon. Les revues horticoles belges du XIXe siècle portent bien des traces de ses expéditions, comme de celles des autres naturalistes-collecteurs belges de cette époque, souvent à la solde d’importateurs de plantes exotiques qui ne cessaient d’exciter ce marché de luxe par de nouvelles introductions. Plusieurs taxons rappellent d’ailleurs le nom du Verviétois, comme le Libonia floribunda ou le Billbergia liboniana, par exemple. Il fait partie de la cohorte des collecteurs-naturalistes à qui, dit-on, l’horticulture belge dut, en bonne partie, son succès.
Denis Diagre
Agence Jardin botanique Meise, Collaborateur scientifique ULB
26 août 2014
denis.diagre@br.fgov.be
Sources inédites
Archives du Jardin botanique national de Belgique, A.J.B. n° 114, n° 551, Lettre d’O. de Limminghe à Fr. Crépin, ?/ ?/1859.
Sources publiées
De Jonghe (J.), Notice historique concernant les explorations de M. Joseph Libon, et les plantes Plantes brésiliennes dues à ses introductions, in L’Horticulteur Français de mil huit cent cinquante et un. Journal des amateurs et des intérêts horticoles, Paris, 1856, pp. 137-143.
Libonia floribunda C. Koch, in Wochenschrift des Vereines zur Beförderung des Gartenbanes in den Koningl. Preussischen Staaten für Gartnerei und Pflanzenkunde, n°34, Berlin, 22.08.1863, pp. 265-267.
G.B., Notice biographique sur Joseph Libon, in La Belgique Horticole. Journal des Jardins, des Serres et des Vergers, t. XIV, 1864, Liège, pp. 14-15.
[Morren (Éd. ?)], Joseph Libon, in La Belgique Horticole. Journal des Jardins, des Serres et des Vergers, t. XV, 1865, Liège, pp. 46-47.
Travaux scientifiques
Grondal (G.), Nos anciens botanistes, in Revue verviétoise d’Histoire naturelle, Bulletin 1952, n° 1 à 10, Verviers, 1952, pp. 12-14.
Brauman (A.) & Demanet (M.), Le Parc Léopold, 1850-1950, Le zoo, la cité scientifique et la ville, Archives d’Architecture Moderne, Bruxelles, 1985, 179 p.
Ceulemans (N.), Jean Linden, explorateur, père des orchidées, Bruxelles, Fonds Mercator, 2006 , 237 p.
Crépin (F.), Libon, Joseph, in Biographie nationale, Bruxelles, Académie royale des Sciences, des Arts et des Belles-Lettres de Belgique, tome XII, 1892-1893, col. 95.
Diagre-Vanderpelen (D.), The Belgian Nurseries introducing « Novelties »: did Belgian Taxonomists really benefit from the Horticultural Industry and Plant Hunters (1830-1870)?, paper presented to the 4th International Conference of the European Society for the History of Sciences (ESHS), Barcelona, 18-20.11.2010.
Diagre-Vanderpelen (D.), Les naturalistes collecteurs : au service de la science… ou du commerce ? Réflexions sur l’étonnant cas belge (1830-1870), in Bulletin d’Histoire et d’Épistémologie des Sciences de la Vie, vol. 18, n°2, Éditions Kimé, Paris, 2011, pp. 131-156.
Diagre-Vanderpelen (D.), La Belgique, le Brésil et Flore (1830-1900), in Terra Brasilis, Catalogue de l’exposition Terra Brasilis, Bruxeels, Festival Europalia Brasil, 2011, pp. 210-219.
Diagre-Vanderpelen (D.), Les plant-hunters belges durant le règne de Léopold 1er (1831-1870) : succès et paradoxe », in Circumscribere. International Journal for the History of Science, vol. 9, 2011, pp. 78-99.
Diagre-Vanderpelen (D.), Le Jardin botanique de Bruxelles, 1826-1912 : Reflet de la Belgique, enfant de l’Afrique, Bruxelles, Académie royale de Belgique, 2012, 296 p. (Mémoire de la Classe des Sciences).
Biographical Dictionary of Overseas Belgians